La publicité ne nous prend pas pour des cons (document 1): elle dit nos désirs avant que le mot désir n’ait fait son chemin jusqu’à nos lèvres, bref elle est en avance et toutes les images dont nous rêvons ont déjà été pensées à défaut d’être vues. Lorsqu’un éditeur malin vendit ses livres en faisant faire un bras d’honneur au père Gutenberg à l’intention de ce faux prophète de McLuhan, il n’inventait rien: l’image après tout, n’a jamais dépossédé la parole de sa maîtrise langan-gière; les mots se déversent en torrents de tous les écrans imaginables.
Fureur du discours, fiihrer, le discours en ses temps de perdition politique. Ce qu’y a de bien c’est que la politique, couic, on peut plus entendre: ni confession de gréviste assumant, ni cours ex- et in-cathedra de pions bien intentionnés: l’ennui a tout tué, tout fait taire. Tant mieux.
Restent les pubs: de Coca Cola à la Dentellière, les mêmes surfaces glacées, l’identique consommation du Rien, que le même, et la mêmeté. Que pouvait-on encore imaginer à déglutir d’images du «Monde»? Et bien, surprise: il restait le plus simple, le regard et l’écoute. Ça a commencé par le silence dangereux dans lequel on enfermait sa femme, son enfant, ses amis; un autisme d’époque, après des années de verbiage inopérant.
Halte là! (document 2) Le fascisme a beau passer tous les jours y a un moment où on se cabre: et bien voilà, à partir de cet arrêt, de cette crispation de l’horreur on s’est dit: faut reparler, mais doucement. Faut re-garder mais les yeux à moitié fermés pour voir plus net; ou plutôt faut pas: je dois faire ceci ou cela. Et quand on savait ce qu’était ceci, on s’est demandé comment faire la différence avec cela; et on s’est fabriqué des bouts de technique, des petites caméras pas chères, des micros assez chers, et des enregistreurs très chers, c’est pour ça qu’ils sont pas à nous et c’est encore un peu emmerdant à cause de. Et ce qu’est chouette, voyez-vous c’est qu’on a plus besoin de personne mais alors vraiment, parce que réfléchir, trouver (document 3) un paysage qui en dise long, écarter son pied «Linhof» à trois cents francs, poser dessus sa caméra à cinq cents et attendre que la lumière en dise encore plus long que le paysage, c’est à la portée de tout un chacun à condition de se casser le cul et de ne pas se fier à ce que racontent les pions de tout poil sur le paysage, le pied ou l’argent. C’est un travail, un vrai moins chiant que les autres et c’est une raison suffisante pour en avoir envie, de travailler s’entend.
J’oubliais à propos du paysage ci-devant: si après quelques ce merveilleux métier et que pour y pallier il n’y a pas de collectif qui tienne; faut que chacun s’y mette dans son coin, on fera les comptes plus tard. En attendant, créons un, deux, trois mille ateliers d’abeilles travailleuses pleins de machines et de questions simples.
J’oubliais à propos du paysage ci-devant: si après quelques mois de saine gestion le Producteur-Technicien réalise un bénéfice, ce qui est un atout pour le producteur, il pourra se payer le micro assez cher dont je cause plus haut et mettre un son sur ou sous l’image selon besoin: un son qui parlerait du rapport du paysage à son enfance par exemple ou de l’absence de ce rapport, faut voir ou «entendre». On avance ainsi lentement mais avec un peu de plaisir, c’est tout ce que je peux dire ici maintenant et «ça», ça en change des choses; reste à interpréter: retour des pions sans doute un beau jour; video mon beau souci! Ces quelques lignes n’ont qu’un objet: d’insister sur l’essentiel, (document 4), qu’on ne peut guère plus qu’il y a cent ans en matière d’image, sinon s’en faire un peu plus.